Aucune histoire, même entreprise avec sympathie, ne restituera jamais cette part humaine de l’engagement libertaire, irréductible aux catégories et aux étalonnages scientifiques. Ce noyau dur de sa singularité, c’est même celui sur lequel peinent régulièrement les historiens de l’anarchisme, nettement plus à l’aise dans la description de ses avancées ou de ses impasses théoriques, de ses grandes gestes ou de ses défaites répétées. D’où la valeur irremplaçable du témoignage pour comprendre l’imaginaire libertaire et l’être anarchiste.
Les quelques pages que nous publions ci-après sont un bel exemple, nous semble-t-il, de ce que nous tentons d’exprimer. Elles disent simplement, le plus simplement du monde, comment, dans les années 1930 et à Paris, on « entrait en anarchie », qui on y fréquentait, ce qu’on y apprenait de la vie et les traces indélébiles que ces rencontres pouvaient laisser sur un adolescent en passe de devenir un militant de toute une vie.
Ces pages, rédigées en 1996, sont extraites des souvenirs inédits de Jean Stas, récemment disparu [1]} Elles sont vivantes, touchantes et suffisamment drôles pour que nous ayons choisi de les inclure dans ce numéro en hommage à son auteur, qui fut un lecteur fidèle de notre bulletin et, qui plus est, un ami.
À contretemps